Tess Dumon
Aujourd’hui je vous présente mon amie Tess Dumon.
Tess est tout à la fois peintre, dessinatrice, sculptrice , plasticienne et… belle personne, ce qui dans son corps gracile englobe le cœur et l’âme, sans avoir à se demander s’il existe une quelconque différence entre toutes ces fonctions, à quoi bon ? tellement elles se confondent l’une en l’autre.
Nous lui avons demandé d’illustrer nos mantras fondateurs : Be Yourself, Hope, Never give up, Engagée, Dream big.
Je dis illustrer par une sorte de paresse du langage, mais il s’agit de bien autre chose.
Il s’agit de leur donner vie et sens, à partager avec vous, dans le paysage mental qui est le nôtre, là où l’on déambule entre émotions, convictions, beauté, souvenirs des moments forts de nos vies, correspondances entre tant de sensations arc-en-ciel.
Tess a spontanément adhéré au projet.
Je prends le risque de rabâcher, tant pis, mais vous le savez, Eluard est implanté dans mon disque dur intime ! « Il n’y a pas de hasards, il n’y a que des rendez-vous ». Vous allez comprendre pourquoi.
Il y a 30 ans, Tess naissait dans une famille aimante, douée pour le bonheur et apte à accompagner ses enfants sur le chemin de la réussite . Hélas, un malheur, injuste et cruel, vint tôt frapper le frère de Tess qui restera emmuré dans son silence. Ce frère en souffrance va contraindre Tess à sa propre métamorphose . Sombrer n’est pas une option, alors qu’il en existe une autre : se sauver.
Pas une fuite, mais la salvation. Dommage que le verbe (se) sauver, en Français, soit ambivalent . En revanche, l’Anglais, comme souvent, ne laisse pas place à la nuance.
S.O.S, signale de détresse universel pour se sauver d’un péril, va droit à l’essentiel : «Save Our Souls». Oui, c’est exactement ça, quand la Faucheuse insiste à tourmenter nos jours et nos nuits, «Sauvez nos âmes » !
Après le Bac. L’âme de Tess errait dans un épais brouillard, dans l’attente d’une corne de brume ou d’une lumière scintillante pour retrouver un cap . Un beau matin, encouragée par ces parents, Tess aperçut ce cap, entrevu pendant l’adolescence, suffisamment hors du temps et de l’espace, dans un univers constellé de beauté et de rage : l’art.
En 2010, le prestigieux Central Saint Martins College of Arts and Design de Londres répondit au S.O.S de Tess. Formidable incubateur, à la fois excentrique et très structuré, qui amena à la célébrité pléthore de créateurs du « swinging London ».
Les Damian Hirst ou Gilbert & George y ont été initiés ainsi que, dans ma branche, les Stella Mc.Cartney, Phoebe Philo ou Alexander Mc.Queen.
Diplômée avec les honneurs de Central Saint Martins, Tess obtiendra dans la foulée un Master au Royal College of Arts. C’est ce qu’on appelle un brillant cursus , simple variante de la quête d’un idéal.
Très vite, les premiers travaux de Tess révélèrent leur force et leur singularité. Elle n’a pas choisi la préciosité de la peinture sur soie ! Tess découpe et forme des bandes de treillis métalliques pour les transformer en sculptures monumentales, de préférence suspendues en l’air . La facilité n’est pas une option . La lutte avec la matière et la conquête de l’espace offrent le salut. À l’issue de ce combat singulier Tess est épuisée ; l’artiste est aussi un artisan dur au mal . Ses mains sont souvent ensanglantées, le métal est retors.
Les psy. de service ne manqueraient pas d’y voir une auto mutilation ou plus complexe encore, des stigmates quasi religieux . Ne nous égarons pas ! La vérité est entre les mains de la pharmacienne, qui sait mesurer la satisfaction de Tess d’avoir fait du bel ouvrage, au nombre de ses passages pour acheter compresses d’Urgo et Biseptine en spray . L’art n’est pas toujours métaphysique, heureusement. Rodin, Camille Claudel, tout comme, plus près de nous, Tinguely et Niki de Saint-Phalle s’amochaient beaucoup en sculptant.
La première œuvre monumentale de Tess, véritable mythe fondateur, est composée de quatre chevaux grandeur nature, faits de cette ruche métallique étincelante. L’ensemble qui fut longtemps suspendu en majesté au plafond de la nef de Central Saint Martins College, a rejoint une collection privée.
Le cheval restera une figure iconique dans le travail de Tess. C’est Pégase, le cheval ailé, si beau qu’il fut autorisé par les dieux à galoper sur l’Olympe. C’est aussi lui qui, sur cette terre ingrate, est appelé par des thérapeutes bienveillants à redonner une joie complice aux autistes. Plus qu’une expérimentation, l’équithérapie est une cause qui touche Tess au plus profond de l’âme.
Et puis les installations lors de biennales, les événements médiatiques, les commandes publiques et privées s’enchainent, les honneurs aussi – mieux, la reconnaissance - . Pas de quoi tourner la tête de Tess, simplement l’autoriser à se dire, le temps d’une volute de cigarette, pas plus : «il y a dix ans , j’étais perdue, je crois bien que j’ai trouvé mon chemin, c’est bien ».
Sur ce chemin, un événement décisif intervint . Fin 2017, après son swinging London, Tess s’installe à Paris pleine de rêves à accomplir, de taille Dream Big , elle aussi . Lors de la Biennale de Paname, elle expose une pieuvre métallique géante de 6m en suspension dans l’air . On y verra une allégorie de l’addiction, empêtrés que nous sommes dans la société de consommation et les GAFAM tentaculaires . La Galerie Dumonteil y vit la promesse d’une œuvre qui laissera une trace et enrôla sur le champs Tess.
Appartenir à une galerie n’est pas une servitude à laquelle s’ajouterait obligations de performance, stratégie marketing et toutes ces choses tellement étrangères à la liberté de créer. Pierre Dumonteil est, avant toute autre considération, un passionné. Il a notamment réhabilité la sculpture française animalière du siècle dernier, y compris Bugatti. Les garçons vont dire « Ah ! Bugatti le concepteur de voitures mythiques » , non ! son frère cadet prénommé Rembrandt.
Ce Bugatti là était promis à un destin exceptionnel loin des circuits automobiles . Mais je m’égare, vous irez Google-iser, Rembrandt Bugatti pour mieux connaître le destin exceptionnel et déchirant de cet artiste . Tout ça pour dire que Tess est désormais entourée de bonne ondes dans cette galerie, qui héberge aussi un autre ami précieux, Ugo Schildge … je vous dis qu’ « il n’y a pas de hasards…. ».
N’imaginez pas que Tess va se livrer à une composition monumentale et métallique de nos mantras , ce serait grandiose , mais un peu présomptueux pour notre Marque et tout ce qu’elle incarne.
Tess est aussi une merveilleuse coloriste et dessine des univers oniriques, entre deux séances de lutte avec le métal. Est-elle apaisée aujourd’hui ? L’indicible souffrance ne l’a jamais quittée, j’en suis presque certaine, mais elle vole, comme Pégase ou les papillons bleus.
« Même pour le simple envol d’un papillon, tout le ciel est nécessaire » disait Paul Claudel, frère de Camille.
Plume : C.H.