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Le Pull marin

Histoire de la mode

Nous avons déjà célébré le Blazer, le Caban et le Trench, qui ont pour points communs d’avoir été conçus marins et/ou militaires avant de traverser deux siècles d’histoire marqués par autant de tourments que de souffle créateur.

 

La Marinière fait partie de la même saga et voici le moment venu de lui accorder la place qu’elle mérite dans notre vestiaire qui, sans être ni marin ni militaire, n’en est pas moins engagé.

 

Maillot de corps à manche longue, à rayures bleues étroites sur fond blanc, le vêtement fit son apparition au XIXe siècle avec rang d’uniforme officiel dans la marine tsariste. L’histoire rapporte que l’amirauté russe puisa son inspiration dans le maillot que certains pêcheurs ou marins bretons portaient dans un but fonctionnel bien précis. Les rayures étaient paraît-il destinées à mieux repérer dans les flots l’infortuné qui passait par-dessus bord. Sécurité dérisoire, des siècles avant l’invention des balises Argos, mais naissance d’un mythe, le maillot de corps rayé était marin par destination et destinée.

Notre marine nationale, à son tour,  puis la marine néerlandaise décrétèrent uniforme règlementaire ce maillot de corps, qui semblait parti pour faire carrière exclusive dans la marine de guerre. 

 

Cependant, tout comme le Blazer, le Caban et le Trench, notre Marinière allait accéder au Panthéon des totems iconiques de la mode, faits pour traverser « des forêts de symboles » pour parler comme Baudelaire dans Correspondances. Née russe sous les tsars, elle devint soviétique avec la révolution d’Octobre, puis les artistes, les poètes et créateurs s’en emparèrent pour lui offrir une vie hors de ses sentiers militaires.

Coco Chanel se l’appropriera dès la fin de la Grande Guerre, entrevoyant dans ce vêtement tout simple et masculin, une façon de libérer le corps de la femme, mantra fondateur de l’univers Chanel. Les bains de mer n’étaient pas encore loisirs populaires, mais la première marinière, en jersey Rodier, créée par la grande prêtresse de la mode dans sa boutique de Deauville, allait inspiré les vagues de créateurs qui se succédèrent.

Karl Lagerfeld, comme une évidence et une citation, ne manqua jamais de dessiner pour la Maison Chanel des marinières pour ses collections, y compris dans ses dernières, peu de temps avant sa mort. Sa collection 2018 s’intitulait Croisière, ce n’était évidemment pas un hasard.

Tant d’autres, sinon tous les autres créateurs, rendirent hommage au maillot de corps à rayures.

Sonia Rykiel, la «Reine du tricot », le dessina avec des bandes arc-en-ciel, puis revint au dessin rituel, bandes bleues fond blanc, dans ses dernières collections.

Dans notre « forêt de symboles », Jean-Paul Gaultier porte marinière comme une seconde peau.

Il en fit le vêtement emblématique et quasi rituel de sa marque depuis le lancement en 83 de sa fameuse collection Boy Toy. Les bandes horizontales sont devenues la signature Gaultier, y compris pour sa célèbre ligne de parfums Le Mâle.

 

Dans mon mood board intime, vous trouveriez pêle-mêle Jean Seberg dans A bout de souffle, Brigitte Bardot dans Le Mépris, qui portaient la marinière avec nonchalance et totale liberté. Vous y verriez aussi la photo de Picasso dans son atelier de Mougins, côtoyant une image de Gondoliers à Venise portant leur maillot rayé traditionnel, comme un uniforme plus romantique que ceux de la marine tsariste ! Vous y rencontreriez furtivement le Mime Marceau dans sa marinière, donnant vie silencieuse et émouvante à Bip, son personnage de la confrérie des hypersensibles HSP que je fréquente quotidiennement.

 

Bref, je ne vais pas refermer derrière moi la porte de mon bric-à-brac, sans évoquer l’installation exposée chez Colette en 2011, consacrée à la Marinière. Y tenaient place en majesté, Hermès, Chanel, Comme des Garçons … Faire entrer un vêtement chez Colette, le regretté concept store de la rue Saint-Honoré, c’était un peu comme l’adouber pièce immortelle. J’y repense avec un peu de nostalgie, parce que peu de temps avant que Madame Colette Rousseaux ne ferme en 2017 ce confluent unique de toutes les tendances, c’est là que le plasticien Blair Chivers sérigraphia pour moi un vieux tee-shirt Uniqlo de ces mots Never EVER give up … L’expo de Blair s’intitulait Life is great …

Je sortais essorée de ma maladie, mais pourtant, Life is great, et me voici aujourd’hui avec vous et pour vous, déterminée à poursuivre la création de notre Vestiaire Engagé.

Le moment est venu de dessiner et produire la Marinière qui portera dans sa fibre nos idéaux :

faire du beau, faire le bien, le faire bien.

A ces fins, avec Mathilde et Virginie, nous avons écumé les fabriques de la Région de Florence, capitale mondiale de la maille et qui recèle entre ses murs quelques trésors de l’humanité, dont la Naissance de Venus de Botticelli et le David de Michel-Ange.

C’est donc à Prato, à 20 kilomètres de Florence, dans les ateliers de Federico, que sera produite votre Marinière. Ni Federico ni nous n’aurons l’audace ou l’immodestie de nous comparer aux grands maîtres de la Renaissance, mais il reste que les lieux recèlent tant de patine et de traces millénaires du génie créatif que cela nous aura peut-être imprégnés, même à notre insu.

Mais restons les pieds sur terre. Nous avons sélectionné la fabrique de Federico parce que celui-ci nous a donné l’assurance de faire bien votre Marinière.

«Zéro gâchis », ses fils, écrus et noirs, proviennent de stocks existants.

Composés de matières (30% de laine, 35% de polyamide, 30% de viscose, 5% de cachemire) intégralement recyclées, le tout est certifié « Global recycled standard ».

Sa fabrication consomme moins de 60% d’énergie, moins de 60% d’eau, moins de 30% de produits chimiques, moins de 75% de CO 2.

Les boutons d’épaulette sont certifiés Oeko Tex et sont fabriqués près de Lyon.

Notre Marinière est bien née.

 

Il ne restait qu’à baptiser notre création d’un nom qui évoque le grand large. 

Nous lui avons donné le nom de WILLIAM, en hommage à l’un des deux William Hawkins, ou bien des deux, que la terre et la mer aient portés. Le premier explora le Brésil au XVe siècle, le second installa un des premiers comptoirs britanniques en Inde au XVIIe, deux authentiques navigateurs homonymes.

 

Homme libre, toujours tu chériras la mer !

La mer est ton miroir, tu contemples ton âme

[…] Baudelaire, encore lui.

Femme libre, aussi, tu chériras la mer … notre Marinière en ton miroir.

 

Réservez William par ici jusqu'à mardi minuit ! 

C.H