Tout d’abord, un usage de la Royal Navy comme de la Marine française voulait que tout marin en retraite pût conserver son caban, à condition d’en enlever tous insignes, y compris les boutons gravés d’une ancre de marine. Ainsi rendue à la vie civile, cette veste à toute épreuve commença à investir en masse friperies et surplus. Au tournant des années 60, époque où la cocotte minute du changement se mit à siffler en sourdine, puis très bruyamment, sur les campus, notre caban devint l’accessoire de l’étudiant fauché. Sorti du campus, le mix caban-pantalon de velours côtelé - Clarks marrons, envahit les cafés où l’on refaisait le monde, y compris du côté de Saint-Germain des Prés.
Jean Cocteau, Jacques Prévert, Boris Vian le portaient sans ostentation, juste comme un vêtement pratique. Même Lou Reed, plus connu comme dandy toxique « [to] walk on the wild side » que comme loup de mer, le portait de façon devenue quasi iconique.
Jacques Brel, authentique navigateur le revêtait contre les mauvais vents qui l’attendaient à destination.
«Dans le port d’Amsterdam, y’a des marins qui boivent… », nul doute qu’ils portaient aussi un caban.
Dans ce foisonnement, la suite était prévisible, dans le sillage des Saint-Laurent et Gaultier, les stylistes et les grandes maisons, de Versace à Hermès, en passant par Balenciaga et Vuitton y allèrent de leur ré-interprétation en adaptant le caban au vestiaire féminin, loin des codes originels… et des prix du catalogue de La Redoute et des surplus populaires. C’est la loi du marché, dit-on.
Cette loi n’est pas vraiment la nôtre. Nous voulons mettre la mode, le savoir-faire, l’artisanat, le beau au service d’un engagement qui fait sens, vous le savez. Notre tour est venu de rendre hommage à ce vêtement fait pour le grand large.
Nous le nommerons «Ernest », comme une évidence.
Comment imaginer Hemingway autrement que vêtu de son caban. Ah ! « Le Vieil Homme et la Mer », qui symbolise avec émotion la lutte éperdue du vieux pêcheur contre les éléments… mais Ernest Hemingway c’est aussi « Paris est une Fête ». Tenons bon, la fête va bien reprendre le dessus sur le virus sournois, question de résilience et de solidarité. Vous voyez ou nous voulons en venir ..?
C.H